« Un apartheid en Afrique de l’Ouest »

Lors d’une conférence de presse donnée à Genève le 18 février 2020, Biram Dah Abeid dénonce un « apartheid en Afrique de l’Ouest »

Transcription de la conférence de presse :

« Je m’interroge sur la viabilité des droits inscrits dans la Charte des Nations Unies, alors qu’un pays comme la Mauritanie est membre du conseil des droits de l’homme, alors que ce pays est un apartheid implanté en Afrique de l’Ouest. C’est un apartheid arabo-musulman car ce sont des personnes, c’est une minorité ethnique qui a une élite militaire qui s’est accaparé le pouvoir, une aristocratie militaire depuis 1978 qui a implanté un apartheid chez nous au cœur de l’Afrique, et qui utilise l’arabité, l’ethnicisme arabe et la religion islamique, pour opprimer une majorité noire et aussi des intellectuels arabes qui sont pour la liberté et pour l’égalité. Ce régime a tenté de changer la démographie de la Mauritanie en tuant une partie des noirs, en les chassant du pays,  donc dans une tentative de génocide.

Ce pays institutionnalise l’esclavage jusqu’à nos jours, l’esclavage par ascendance, il y a un partie de la population mauritanienne qui naît esclave, et les crimes d’esclavage qui sont pratiqués, le travail sans repos, sans salaire, sans soins, la mise en péril de la scolarité des enfants, le travail des enfants, les travaux forcés, le viol systématique des femmes africaines esclaves, tout ceci est inclus dans ce qu’ils appellent la « charia islamique », et des personnes sont poursuivies pour apostasie, pour blasphème, et sont condamnées à mort pour ça, alors qu’en vérité, c’est se rebeller contre les lois sociales inégalitaires, les lois d’apartheid.

Le code négrier, le code noir, qui a été aboli en Europe depuis 1848, c’est un code qui est vivace chez nous, et qui est considéré comme une charia sacrée, et que moi j’ai offert au feu, j’ai brûlé dans un acte de rébellion, dans un acte de dissidence politique, idéologique et religieuse, ce qui m’a valu la peine de mort, et plus de 4 mois dans le couloir de la mort. Je n’ai pu sauver ma vie qu’avec la mobilisation de la population interne et des amis à l’étranger dans les organisations internationales des droits de l’homme.

Et c’est un pays qui est soutenu par les pays des droits de l’homme, la France, l’Espagne… L’Union européenne est le premier partenaire commercial, économique et financier de la Mauritanie, et le bailleur de fonds n°1, l’Union africaine est le premier soutien diplomatique de ce pays qui institue l’apartheid en Afrique de l’Ouest, et les États-Unis d’Amérique sont les premiers soutiens militaires et sécuritaires de ce pays.

Il y a une minorité qui dirige. Nous avons opté pour la non-violence, la lutte non-violente, et nos partis, nos mouvements sont interdits, comme l’ANC était interdite en Afrique du Sud. Aux dernières élections, j’ai pu être élu au Parlement car j’ai utilisé un autre parti parce que notre parti est interdit. Quand ma candidature a été validée, on m’a mis en prison, pour empêcher que je fasse campagne. J’ai été élu député depuis une cellule de prison, noire, insalubre, sans pouvoir faire la campagne. Et malgré mon élection comme député, je suis resté en prison pendant 4 mois, malgré mon immunité palementaire. Et quand je suis sorti de prison, on a engagé les élections présidentielles que nous avons gagnées car la mobilisation populaire nous a permis d’amener le parti de l’armée et de l’oligarchie de l’apartheid au deuxième tour. Mais il y a eu un coup d’état électoral dans lequel la France et l’Espagne ont joué le rôle n° 1. Lorsque les militaires hésitaient à déclarer que leur candidat était gaganant, la France et l’Espagne ont pris les devants pour reconnaître l’élection du candidat de ce parti de l’esclavagisme et du racisme, de l’obscurantisme. C’est la France et l’Espagne qui ont déclaré reconnaître l’actuel chef de l’Etat gagnant, alors que les institutions mauritaniennes n’avaient même pas encore déclaré les résultats. C’est ce qui a permis aux détenteurs du pouvoir de faire un coup d’état qui élimine le peuple de la direction des affaires du pays. Nous sommes interdits politiquement. Notre association IRA Mauritanie est interdite. On fait de la prison. L’esclavage continue de manière ancestrale, la discrimination raciale, l’oppression des consciences, l’oppression religieuse, et c’est le monde libre qui soutient les gens qui enfreignent les lois des Nations-Unies, et les Nations-Unies continuent d’accueillir la Mauritanie dans leur conseil des droits de l’homme, et les bailleurs de fonds comme l’Union européenne, les États-Unis d’Amérique, la France, et les autres pays, continuent encore à donner de l’argent et du soutien diplomatique et matériel à ce pays. Je vous remercie »

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